paysage vignes, villages et fleuve

Respecter les terroirs
& Préserver les ressources

DÉFILER VERS LE BAS

Le vitipastoralisme,
ou un mouton pour tondeuse

C’est avant tout une histoire de conviction : celle qu’un sol en bonne santé est la base à toute culture pérenne, mais aussi une relation de confiance entre le vigneron et l’éleveur.

La présence des brebis dans les vignes de septembre à mars, après la fin des vendanges et avant l’éclosion des premiers bourgeons, a plusieurs effets bénéfiques. Le premier constat est que l’herbe repousse moins vite du fait d’une tonte permanente. On observe aussi un accroissement de la biodiversité et une recrudescence des insectes, véritable garde-manger pour les oiseaux qui vont ainsi réguler les populations et diminuer les risques sanitaires pour la vigne.

Les déjections des moutons et l’enfouissement mécanique de l’herbe après leur départ constitue un premier apport d’engrais organique et permet par la même occasion de décompacter les sols soumis au piétinement des brebis. Enfin, la présence des moutons diminue le nombre de passages du tracteur dans les vignes pour travailler les sols, réduisant ainsi le bilan carbone.

 

Plus qu’un vignoble de carte postale, cette collaboration intelligente assure 20 % du besoin alimentaire annuel d’un troupeau et en période de pâturage dans les vignes, ce chiffre monte à 40 %*. Côté berger, on comprend mieux pourquoi il a le vent en poupe.

 

Côté vigneron, Louis Lefebvre, président du Syndicat des Vignerons de Sabran, converti au viti-pastoralisme depuis une décennie, estime que l’autre vertu de ce mode cultural est de conserver l’humidité dans les sols. Quant à Pierre Latard, président du Syndicat des Vignerons de Saint-Hilaire d’Ozilhan, cette forme d’agropastoralisme fait partie de son modèle de viticulture biologique et lui économise, a minima, un passage en tracteur consacré au désherbage mécanique.

 

Mais les moutons ne sont pas les seules stars des vignes. A Rochefort du Gard par exemple, Le Château Terre Forte, met à contribution des lamas pour entretenir les haies et les bois!

 

Actuellement, le Syndicat des vignerons des Côtes du Rhône, étudie la création d’une plateforme pour mettre en relation les vignerons et les éleveurs afin de faciliter le développement du vitipastoralisme. Dans les Côtes du Rhône, on estime àprès d’une centaine le nombre de domaines engagés dans une démarche de vitipastoralisme.

*source : Magazine le Vigneron des Côtes du Rhône et du Sud-Est, juin 2020.

https://www.syndicat-cotesdurhone.com/upload/article/file/moutons903juin20202-5edf7948a718f.pdf

https://www.mon-viti.com/articles/viticulture/ils-testent-le-viti-pastoralisme

dossier vitipasto réussir vigne. (source syndicat des CDR)

De plus en plus de certifications environnementales

Tous les labels environnementaux obéissent à des Cahiers des charges et sont attribués par des organismes certificateurs.

Par exemple, le label Haute Valeur Environnementale (HVE) définit les règles d’une agriculture raisonnée responsable en minimisant les produits phytosanitaires ou intrants, en privilégiant l’enherbement maîtrisé des parcelles, le maintien des haies et des arbres remarquables, des murets en pierre sèche, des fossés d’écoulement des eaux pluviales … l’objectif est de protéger les sols, de favoriser une plus grande biodiversité en maintenant l’habitat naturel de la faune sauvage pour offrir au consommateur un produit issu d’une agriculture engagée dans un processus vertueux.

Le label Vignerons Engagés va plus loin en répondant à une double exigence environnementale et sociétale. C’est le cas notamment de la Cave des Vignerons de Tavel & Lirac qui interroge toute la chaîne de production de la vigne au vin, de la souche au verre. Cette politique globale se traduit en minimisant les intrants dans le vignoble et dans la cave lors de la vinification. Elle englobe aussi le management des équipes, la gestion des stocks en diminuant le papier, les fournitures et en privilégiant la dématérialisation.

 

Côté Bio, le cuivre et le soufre sont les seuls produits utilisés par le vigneron pour lutter contre les maladies de la vigne.

En Biodynamie, ce sont des préparations à base de plantes, de silice de corne ou de bouse de corne qui sont pulvérisées sur la vigne pour la fortifier. Enfin, l’Association des Vins Naturels regroupe les vignerons qui travaillent sans aucun intrant.

 

La certification, quelle qu’elle soit, est aussi la reconnaissance d’un chemin personnel (parfois familial) résultant de l’observation de son patrimoine viticole. Chacun prend les orientations qu’il juge les plus adaptées à ses parcelles, à sa propre sensibilité, et à sa structure. Certains adoptent aussi des pratiques vertueuses hors de tout processus certifiant, simplement par bon sens et pour préserver les terroirs qui sont indispensables à leur pérennité. C’est la somme des engagements de tous qui rend la viticulture vertueuse et responsable.

 

En 2020, la récolte en AOC Côtes du Rhône et Côtes du Rhône Villages est de 1.6 millions d’hectolitres (hl). La part de la production en AOC Côtes du Rhône et Côtes du Rhône Villages revendiquée en culture biologique est de 185 000 hl (environ 12 %). A ce jour, 574 exploitations sont labellisées HVE pour une surface totale de 19 200 ha.

Note:

574 étant le chiffre après certification au mois d’août 2020 de 209 nouvelles exploitations

Le Guide des recommandations environnementales

Comment produire des vins en harmonie avec les écosystèmes?

Le Guide, en cours de rédaction* par le Syndicat des Côtes du Rhône liste un ensemble de pratiques destinées à encourager l’agriculture biologique, favoriser et accompagner le changement des pratiques agricoles en privilégiant le travail mécanique des sols pour désherber, voire pratiquer un enherbement choisi ou d’un rang sur deux.

En matière de couverture végétale, le Cru Tavel a par exemple inscrit dans son Cahier des charges, dès 2011, des mesures agro environnementales visant à maintenir les tournières enherbées (place de retournement des tracteurs). L’Association Technique des Côtes du Rhône septentrionaux mène avec les appellations Condrieu, Côte Rôtie et Saint Joseph des essais d’enherbement et de paillage des vignes.

 

Le Guide vise à privilégier les produits alternatifs aux pesticides de synthèse, limiter l’utilisation et les déperditions des produits phytosanitaires dans les vignes avec un matériel plus adapté ou à déployer des modes de protection du vignoble alternatifs.

Par exemple, pour lutter contre le vers de la grappe la société Coop’Tain, en partenariat avec les Crus Crozes-Hermitage, Hermitage, Saint-Joseph, Cornas et Saint Péray a installé des diffuseurs de phéromones de synthèse destinées à perturber l’activité sexuelle des insectes nuisibles. Cet aménagement, couplé à l’installation d’abris à chauve-souris, couvre une surface de 900 ha.

 

En accord avec ces préconisations, Rhônéa, union de caves coopératives de Beaumes de Venis, Vacqueyras, Rasteau et Visan, labellisée Vignerons Engagés, s’est équipée en 2019 de 7 stations météo connectées afin d’optimiser l’efficacité des traitements phytosanitaires, notamment contre le mildiou.

 

Le Guide s’attache à identifier les zones sensibles, notamment les parcelles proches des cours d’eau impliquant le respect de la réglementation plus contraignante, et à appliquer une gestion stricte des effluents en cave.

 

Ces mesures d’informations et d’accompagnement portées par le Syndicat des vignerons des Côtes du Rhône ont pour ambition de faire évoluer les pratiques culturales vers un modèle durable afin de protéger la qualité de l’air, des sols et la ressource en eau. C’est le sens du projet porté depuis trois ans par le Syndicat de Lirac, Cru de l’AOC CDR.

 

A ce jour, on constate dans les Côtes du Rhône une évolution des conversions vers l’agriculture biologique et une forte progression des caves et domaines engagés dans le processus de labellisation Haute Valeur Environnementale (HVE).

*Deux premières fiches seront diffusées en 2021 sur la plantation de végétaux et la mise en place de couverts végétaux.

Source

Plan d’action stratégique environnementale des Côtes du Rhône / Janvier 2019

Préserver les captages
d’eau potable prioritaires

On entend par prioritaire, les zones de captage actuelles et futures qui sont les plus vulnérables aux pollutions agricoles.

Les principaux agents polluants étant les produits phytosanitaires qui peuvent atteindre la nappe phréatique par infiltration ou ruissellement. Le Syndicat des vignerons des Côtes du Rhône travaille en étroite relation avec l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse* pour identifier ces zones et conduire des plans d’actions pour préserver la qualité de l’eau.

Ce volet lié à la protection et à la gestion intelligente des ressources est inscrit dans la Charte paysagère environnementale des Côtes du Rhône. Le schéma directeur d’aménagement de gestion des eaux 2016-2021 recense 269 captages prioritaires dont 10 se situent dans l’aire de production des Côtes du Rhône. Leur protection se décline selon un processus découpé en quatre phases:

 

  1. Délimiter la surface sur laquelle l’eau s’infiltre ou ruisselle.
  2. Identifier et hiérarchiser les sources de pollution.
  3. Elaborer un plan d’actions
  4. Mettre en œuvre les actions pour préserver la ressource à un bon niveau qualitatif.

 

En relation avec les Chambres d‘agriculture, le rôle du Syndicat est de travailler avec les vignerons concernés pour les amener à faire évoluer leur modèle cultural. Ils jouent un rôle important dans la préservation de la qualité de l’eau.

Quant aux vignes irriguées, l’objectif est d’apporter avec justesse l’eau qu’il faut au vignoble pour éviter le stress hydrique. Depuis trois ans, le Syndicat publie « le journal du stress hydrique des Côtes du Rhône » pour alerter les vignerons en cas de besoin.

 

* créée suite à la loi sur l’eau de 1964, les missions de cet établissement public placé sous la tutelle du ministère de l’Environnement sont : la gestion de l’eau, la lutte contre sa pollution, la protection des milieux aquatiques et de leurs biodiversités.

Source

Le Vigneron mai 2018

Protection des captages, guide méthodologique, 2013

Réduire son impact environnemental,
et recycler ses déchets

Le principe est d’optimiser chaque étape du processus d’élaboration et de conditionnement des vins afin de préserver les ressources.

En premier lieu, il s’agit de collecter et de recycler les emballages et films plastiques de conditionnement des produits phytosanitaires.
En cave, l’eau utilisée pour le rinçage des installations contient des débris de végétaux, des terres de filtration, des levures, des micro-organismes, des sucres, des acides organiques, de l’alcool … Ces effluents sont envoyés dans une fosse de décantation afin d’en récupérer les matières organiques qui sont valorisées en engrais*.

Lors du conditionnement du vin en bouteille ou Bag in box (BIB) les emballages sont optimisés pour les rendre recyclables. Moins gourmand en matière première, leur poids est limité. Ce qui se traduit par une baisse des émissions de CO2 à la fabrication et lors du transport.

 

Encre végétale, verre et bouchons issus de filières 100 % recyclés… Toute la chaine de production est passée au crible dans le but de développer une activité durable.

Ces aspects entrent aussi dans une démarche globale de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), dont La Maison Sinnae, à Laudun, est la première entreprise viticole de la Vallée du Rhône à être labellisée « Engagé RSE » au niveau Exemplaire.

*La Mission d’Expertise et de Suivi des Epandages (MESE), financée par l’Agence de l’Eau, veille au respect de la réglementation des épandages agricoles.

Source

https://gard.chambre-agriculture.fr/fileadmin/user_upload/Occitanie/066_Inst-Gard/Documents/7_Agroenvironnement/MESE_Gard_Effluents/MESE_NOTE_TECHNIQUE.pdf

https://www.reussir.fr/vigne/recyclage-des-dechets-la-filiere-vitivinicole-peut-mieux-faire

https://sinnae.fr/notre-engagement/

Variété des cépages
et règles d’assemblage

L’appellation Côtes du Rhône compte 23 variétés de raisins autorisées (on parle de cépages). Leur culture varie selon le climat et le sol, c’est l’effet terroir.

Les vignerons de l’AOC les ont sélectionnés au fil des siècles pour leurs qualités gustatives et la finesse qu’ils procurent aux assemblages afin d’obtenir des vins équilibrés, harmonieux. L’encépagement du vignoble des Côtes du Rhône est régi par un Cahier des charges. Les cépages principaux de l’appellation en rouge sont le Grenache, la Syrah, et le Mourvèdre. Ils représentent à minima 70 % de l’encépagement. En blanc, ce sont les Bourboulenc, Clairette, Grenache Blanc, Marsanne, Roussane et Viognier. Ils représentent a minima 80 % de l’encépagement. Face à l’évolution du climat et pour lutter contre les maladies l’AOC a autorisé sous certaines conditions la plantation de nouveaux cépages issus de croisements. Ce sont les Caladoc, Marselan et Couston.

Les Côtes du Rhône sont des vins d’assemblage dans lesquels on retrouve, à minima, 2 cépages dont on associe les qualités pour obtenir un vin équilibré. Chaque vigneron peut définir la proportion de chaque cépage dans l’assemblage final (dans la limite du respect du Cahier des charges de l’AOC): une vraie palette, qui permet à chacun de trouver son style. Dans les Côtes du Rhône septentrionaux en revanche, la Syrah est autorisée seule.

 

En terme d’assemblage il existe plusieurs écoles: vinifier les cépages séparément, faire un assemblage sur cuve (c’est-à-dire en mettant dans la même cuve plusieurs variétés de raisins dans des proportions variables), ou encore « assembler à la parcelle » (vendanger en même temps les vignes « complantées en foule » dans la même parcelle quel que soit leur degré de maturité). Mais le choix final revient au vigneron. La parfaite connaissance de ses parcelles et de son encépagement lui permet de créer des vins à son image et dans le respect des terroirs des Côtes du Rhône.

 

Le Syndicat des vignerons des Côtes du Rhône participe également à un programme de sélection de cépages résistants à certaines maladies, pour encore moins traiter les vignes, tout en conservant la typicité des vins de l’appellation.

 

En 2021, 6 cépages prometteurs, issus de croisements naturels entre la Syrah et le Grenache, ont été plantés au Lycée viticole d’Orange. Sélectionnés par le Syndicat des Côtes du Rhône, ils montrent un bon potentiel face au changement climatique, et particulier de tolérance à la sécheresse.

* L’encyclopédie des vins AOC Côtes du Rhône et vallée du Rhône

*https://www.syndicat-cotesdurhone.com/upload/9/img_5d1a1cecafc98.pdf ( mai 2019)

La gestion des jachères

Lorsqu’une vigne est arrachée, il est recommandé de laisser la terre en jachère, sauvage ou plantée, pour qu’elle se régénère. Ce temps de repos contribue à la restructuration des sols.

Egalement appelées Zones Ecologiques Réservoir, ce sont des surfaces vierges de tout traitement et fertilisant. Elles participent au maintien de la biodiversité, à l’absorption de l’eau et ralentissent l’érosion des sols, notamment sous l’action du vent. Elles prennent diverses formes : arbres isolés, en haies ou en bosquets, talus et zone de retournement des tracteurs végétalisés (tournières), enherbement partiel ou total de la vigne. Elles font partie intégrante du Label Haute Valeur Environnementale.

Lorsqu’un ensemencement est envisagé, il est choisi selon plusieurs critères: son esthétique, ses qualités curatives pour enrayer les maladies de la vigne comme le Court-Noué*, sa résistance au climat méditerranéen et sa capacité d’adaptation aux terrains rustiques.

 

Ils sont de plus en plus nombreux comme Vincent Boyer, du domaine de la Bastide à Visan, à opter pour des jachères fleuries.

Outre une préparation du sol adaptée, ce choix implique d’être attentif au mélange de graines en évitant les plantes exotiques qui pourraient perturber la biodiversité.

En cas de jachère pérenne, il est conseillé d’opter pour des plantes vivaces réputées pour leur floraison généreuse.

* Le Court-Noué est une maladie transmise à la vigne par un ver microscopique qui pique les racines pour se nourrir. Il entraîne un dépérissement de la plante qui se traduit par une baisse de qualité du raisin, voire la mort du cep et peut conduire à un arrachage précoce de la parcelle.

Source

https://www.syndicat-cotesdurhone.com/liste-articles/charte-paysagere-environnementale

L’ Agroforesterie, comme si la vigne
était un jardin

L’agroforesterie est l’union de la vigne et de l’arbre, pour lutter contre l’érosion des sols, protéger la biodiversité, tempérer les excès climatiques et améliorer le cadre de vie.

Esthétique et vertueuse, l’agroforesterie conjugue les impératifs liés au changement climatique avec l’organisation et l’harmonisation du vivant. C’est-à-dire penser la culture de la vigne sans contraindre les espaces de plantation mais en s’appuyant sur leurs géomorphologies pour l’intégrer dans un écosystème. Il s’agit ainsi de maintenir en bon état la flore endémique, des zones de vie et de nidification pour les espèces animales. On parle donc d’équilibre entre le vivant et l’activité humaine.

La scop Agroof : Société coopérative et participative spécialisée dans l’étude et le développement des systèmes agroforestiers depuis 2000, accompagne les agriculteurs dans cette démarche. Elle détermine avec eux les essences d’arbres ou de haies à planter. Elle répond à leurs interrogations quant aux baisses de rendement de la vigne liées, notamment, au stress hydrique et si ces plantations ont un impact sur le stockage du carbone pour lutter contre le réchauffement climatique.Les résultats montrent qu’il n’y a aucune concurrence hydrique entre les arbres et la vigne et que l’agroforesterie a un effet bénéfique sur le bilan carbone.

 

Un plan de relance de 100 milliards d’euros* est déployé par le gouvernement autour de 3 axes : l’écologie, la compétitivité et la cohésion. Un des objectifs, « plantons des haies » vise à en planter 7000 kms entre 2021 et 2022.

 

Mission accomplie dans les Côtes du Rhône avec Rhônéa, union de caves coopératives labellisée Vignerons engagés, qui a planté 1 200 mètres de haie en trois ans afin de restaurer l’équilibre des écosystèmes. Même engagement de l’Organisme de Défense et de Gestion (ODG) de Cairanne où 20 vignerons ont déjà planté 400 végétaux, des essences locales, et ont pour ambition de planter 1000 arbres à l’horizon 2025. L’engouement pour l’agroforesterie est réel. De nombreux domaines des Côtes du Rhône sont déjà engagés dans ce processus, comme le Mas de Libian en Ardèche ou la Ferme des 7 Lunes, avec l’association Drômoise d’agroforesterie.

 

*Le Vigneron Mars 2021 p10